Samuel Degasne

Journaliste dépendant & théoriste musical.

Tecktonik : le buzz a pris le pas

Souvent mal orthographié sur Internet (techtonik, techtonique, tecktonique), le mouvement vit actuellement une révolution médiatique à l’image du Break Dance 70’s et du Disco des 80’s. La différence ? Exit l'influence américaine ! La Tecktonik s’inspire de la musique Hardstyle d’Europe du Nord (Belgique, Pays-Bas, Allemagne). Mais loin de n'être qu'un mix HardTeck/Transe, le phénomène fait surtout parler de lui pour sa danse désarticulée et ses coupes de cheveux néopunks. Bien gentil tout ça, mais est-ce vraiment tout jeune ?

tecktonik.jpgHein ?
La Tecktonik est le nom raccourci des soirées « Tecktonik Killer » de la discothèque Metroplis à Rungis, organisé par Cyril Blanc et Alexandre Barouzin. Elle ne définit à l’origine aucun style de musique électronique, étant donné qu’il s’agit essentiellement de Hardstyle (de la Techno hardcore et ses sous-genres comme la Gabber) ou de Jumpstyle (danse spécifique avec des sauts sur une jambe). Mais fort du succès de ce rendez-vous parisien, il a été développé une marque de vêtements, une boisson énergétique et plusieurs compilations qui ont provoqué la confusion et une dérive sémantique. Désormais, par raccourci, les médias généralisent donc l’ensemble sous la même appellation. Il faut dire qu’à grand renfort de publicités et d’opérations marketing, une véritable scène s’est formée sous cette bannière, tant au niveau des DJ (Dess, RV.B, Deepack, Max B Grant, Miss Hiroko) que du côté des danseurs (Treaxxy, Vavan, Micktazz, LeCktra, Spoke, Jey-Jey, Calimero, Nemoo, Maestro, Jack Herror, Neeko ou Karmapa).

Pourtant le phénomène n’est pas nouveau car la danse est apparue en 2000 sous le nom de Milky Way. La véritable révolution se situe, elle, sur le buzz qui s‘exerce dans la rue avec de nombreux battles improvisés à l’américaine  et départagés à l’applaudimètre. Le Metropolis, épicentre légitime de l’engouement français et d’une capacité de 8000 personnes, joue généralement à guichet fermé. Mais bien plus que la musique, c’est la danse qui a alimentée les médias en images et marquée les esprits. Une danse accélérée et décomplexée qui, il faut l’avouer, est moins impressionnante que le Krump de Los Angeles, mais plus présente en France. Même les clips de musique (Yelle ou Lorie par exemple) recyclent le buzz. Car c’est l’explosion des carcans et la liberté d’emprunt aux autres danses (hip-hop, locking, popping, toprock, vogguing) qui facilitent ici la généralisation, même si la figure la plus caractéristique de la Tecktonik reste le mouvement du bras autour de la tête.

Pourquoi ?
Dans une société qui se recentre sur l’individu (blog, publicité personnalisée, refus de l’information ou de la communication de masse) la notion de performance et de compétition est renforcée. Un simple anonyme peut devenir rapidement une star, comme le disco le faisait à son époque. Dans la danse, chacun est égo et peut dépasser son quotidien sans considération sociale. D’autant qu’appartenir à une communauté en marge est valorisant pour l’individu. Les rave parties instauraient de la même manière une société dans une société, d’où les signes de ralliement de la Tecktonik : jean slim avec un aigle, guêtres fluos, coupe de cheveux futuristes et parfois maquillage. Enfin, c’est également le retour de la Dance (ou EuroDance du fait de son origine) connue pour ses productions commerciales au début des années 90 : Haddaway, Corona, 2 Unlimited, Reel 2 Real, Vengaboys, Cappella, Masterboy et autre Culture Beat. L’esprit jogging/k-way rose-vert de nos enfances… C’est ça la nostalgie ?

Sont forts ces Belges, quand même !

LIEN

> Mouvement krump

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