29 Mai 2008
Dandysme incandescent, électro sautillante et new wave éméchée… Le 2e opus du quinquet parisien confirme que le rock peut encore surprendre le dancefloor, et inversement. Après quelques amorces sur David Lynch, les films nanars ou les bars parisiens, rencontre avec le crooner trash Nicolas Ker et le soundwriter destroy Laurent Bardainne.
Comment s’est réalisée la signature avec le label Tiger Sushi ?
Laurent : Venant du jazz, nous avions le fantasme de jouer du rock. A l’origine, nous avions une formation trip-hop chiante du nom de Crépuscule, avec une chanteuse. Vu que nos nouveaux morceaux sonnaient new-wave, on a donc tenté de se rapprocher de The Record, mais le patron du label est un filou. Il nous a orienté vers une fausse adresse et nous sommes tombés par hasard sur Tiger Sushi. (Rires) On a ensuite passé une annonce pour un chanteur. Je crois même que j’ai encore la lettre de présentation de Nico !
Qu’est-ce qui a évolué avec ce 2ème album ?
Nicolas : Nous avions une volonté pop. Un « Poni Hoax for sale » avec une collection de singles, juste pour le fun ! (Rires) Etant donné que certains viennent du conservatoire ou du funk, il y avait de la rigueur et tout s’est mis en place rapidement
L : Le leitmotiv était la danse, même si Nico déteste danser. Quelque chose qui tienne la route, à côté d’un batteur qui joue avec Rokia Traoré ou d’un guitariste qui voulait de la noise. Finalement, en écoutant les Daft, je me suis rendu compte que l’on pouvait faire une musique subtile et danser dessus sans complexe. C’est devenu une évidence et il ne nous a fallu que 3 répétitions pour rentrer en studio.
Au vu de votre musique, êtes-vous nostalgiques ?
L : Les Stones et les Doors sont notre seul compromis dans le groupe, même si on ne peut pas nier des influences comme The Cure, ou Daho… Mais oui, ce n’est que l’accident qui peut créer l’inédit.
N : J’ai fait Math Sup et je peux vous dire que rien n’est stable, même dans les mathématiques. La Science, c’est le doute permanent.
D’où vient l’idée du personnage de Sigrid qui donne son nom à l'album ?
N : C’est une nana mannequin, que nous croisions souvent dans les expos. De là est venu l’idée d’un thème général sur la surconsommation de culture et de communication.
L : Et puis, c'est un nom qui claque ! De manière symbolique, Sigrid est d'ailleurs venue faire les chœurs sur un de nos morceaux. Nous voulions parler de la solitude des gens dans les grandes villes et Nico était célibataire à l’époque... Aujourd'hui, on a tous une obligation de bonheur et une addiction aux moyens de communication, style e-mails et SMS. A New-York, je me suis senti seul au monde…
N : C’est dingue ! Pour qu’ils se parlent, il faut une interface entre les individus. Le besoin d’un objet transitionnel. Je pense que les gens devraient pousser le trip à donner des noms d’animaux à leurs objets. (Rires)
Vous avez besoin d’une thématique par album ?
N : Ca permet d’ouvrir les vannes. Il n’y a pas de libertés sans contraintes. Les textes à thèse, j’essaie de les ouvrir à l’interprétation, de la même manière que Lynch a un rituel strict et se laisse porter par l’inconscient collectif. C’est le ressenti personnel qui en oriente ensuite le traitement. Le matériau de base n’existe pas. Seul l’esthétisme est maîtrisé ! Le temps est linéaire : tout procède par plagiat. On ressasse les mêmes thèmes et la nouveauté est une illusion progressiste.
Comment expliquer votre récente surexposition ?
N : Les mauvaises critiques nous font aussi rire. Par exemple, il y a un blog qui a dit que nous avions des têtes de Pow Wow. J’ai trouvé ça génial ! (Rires) C’est notre côté masochiste. On considère que c’est déjà cool qu’on parle de nous, et sans égocentrisme. On n’est pas successible.
L : Le côté hype vient de notre label électro. Pourtant, si nous traînons au Paris Paris, on traîne aussi dans les troquets du 18ème. Nous ne connaissions pas tous ces djs avant.
Comment appréhendez-vous les remixs de vos chansons ?
N : Le remix de Chloé était une tuerie. Etant donné que la musique nous échappe à la base, il n’y a aucun problème pour que quelqu’un se l’approprie.
L : C’est toujours hallucinant de voir que des titres écrits dans une chambre sont ensuite repris par d’autres. Par exemple, le remix de « Budapest » par Joachim était très touchant.
Quel regard porte les autres pays sur votre travail ?
L : Nous avons beaucoup joué à l’étranger. Il n’y a qu’en France que les gens se prennent la tête sur notre anglais. A l’extérieur, on focalise juste sur le fait de faire un bon concert. C’est tout. Nous, pendant ce temps-là, et même si nous ne gagnons pas trop de sous, on voyage.
Réfléchir au prochain album, c’est se maintenir en mouvement ?
N : On parle déjà du suivant parce qu’on s’emmerde. La pochette, les notes, le thème…
L : C’est aussi pourquoi nous avons des projets parallèles. Sinon, je vais jouer à Wow. (Rires)
N : Et moi à Call of Duty !
L : C’est la phase la plus tripante, car le produit fini est très peu intéressant. Nous pouvons encore améliorer les lights et les clips. Et puis, quand je vois avec quelle galère nous débattons sur les photos, je me dis que c’est justement là que nous sommes avant tout musiciens...
De quoi parlera ce troisième opus ?
N : De la guerre, mais sans sombrer dans la lamentation ! Je viens du Cambodge. Je suis un war baby. C’est vous qui êtes traumatisés, pas nous. En France, on est très protégé alors que la guerre est une valeur commune entre les peuples et les générations. Par exemple, je veux raconter l’histoire de cet ambassadeur américain en Iran qui baisait comme un fou le soir... La guerre, c’est aussi intime et la vengeance est contagieuse. Je pense aborder le thème à travers le déchaînement sexuel que cela provoque. C’est Léonard Cohen qui disait « La guerre a été faite par les vieux pour pouvoir baiser les femmes des jeunes. » (Rires)
L : J’ai moi aussi une fascination pour la folie ultime. La guerre est un état naturel. Mais, ne vous inquiétez pas, nous allons crypter tout ça. Le pire, c’est que Nico est assez fort pour écrire un texte en une seule après-midi.
N : La musique est préexistante. Quand on est disponible, pas besoin de batailler, toutes les influences se déversent d’un seul coup…
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