Samuel Degasne

Journaliste dépendant & théoriste musical.

Jeu : pourquoi un tel fossé en France ?

Si sous les sunlights des tropiques les différentes générations s’affrontent à coup de dominos et qu’au pays du Soleil Levant le jeu traditionnel est une valeur commune et fédératrice, la France semble ne pas vouloir franchir le pas. L’après-midi belotte réservé aux clubs grisonnants fait grimacer les accros de la manette et inversement. A la base du conflit, de gros préjugés que l’on met sur le compte d’une sénilité baveuse ou d’une poussée juvénile d’envies révolutionnaires.

Rien n’y fait. Les deux camps s’affrontent aussi farouchement qu’une rencontre PSG / OM et personne n’y démord. Les uns refusent une énième partie de Scrabble avec mamie-qui-pique, tandis que les autres postillonnent devant la violence des jeux vidéo. Pourquoi ? Parce que la France considère encore que les dés et les mots croisés sont à ranger du côté antiquité autant que le jeu vidéo parait infantile et infantilisant. Pourtant, et sans aucune comparaison à la mode centriste actuelle, un juste milieu peut être profitable aux deux. A croire que seuls les jeux sexuels, de hasard ou de boisson mettent tout le monde d’accord.

Cartes sur table
L’importance du jeu n’est plus à démontrer. Au-delà même de la nécessité d’entretenir sa mémoire et ses capacités stratégiques (gniarf gniarf gniarf), l’attrait principal du jeu est sa substitution à la réalité, tant que l’on n’arpente pas les rues en tenue de plombier moustachu ou en hérisson dévastateur. C’est un espace de liberté à l’intérieur de règles définies. Jouer ou inventer un jeu tient même lieu d’activité créative et de détente. Oui, même jouer à GTA, c’est travailler son imaginaire et échanger une culture commune ! (Bon, vite dit, alors). Malgré ça, la France reste bornée à ne pas réussir une activité réunissant toute la famille

Hors jeu
Ils sont pourtant nombreux à travers le monde à en avoir compris les différents enjeux. L’Allemagne, surproducteur de jeux de société, organise ses loisirs familiaux autour de cette initiative. Mieux encore, les asiatiques la considèrent comme un des vecteurs de la réussite. En effet, un même jeu peut à la fois servir au rattrapage scolaire, au recrutement ou pour conserver toute sa tête. Ainsi l’apprentissage s’exerce de façon ludique, liant les générations entres-elles et repoussant les limites du cerveau humain. Un enseignement inspiré de Platon et John Locke (philosophe anglais du XVIIe siècle) qui usèrent d’une quantité impressionnante de salive et d’encre pour ne se faire finalement entendre qu’au cours du XXe siècle. Que voulez-vous, même les scientifiques prétendant que la Terre n’était pas aussi plate qu’une Jane Birkin furent pris pour des fous…

Here Wii go
A vous donc de convaincre votre entourage que le jeu n’est pas qu’une affaire de génération. Mieux, militez pour une prochaine option au bac : « Pour vivre mieux et vieux, adoptez le jeu ! » Vous seriez alors surpris de voir vos parents préférer une séance de checker quotidienne devant la Wii plutôt que la salle de sport, vous faire humilier à cause de la dextérité du grand-père et sa tremblote, ou parler mythologie avec la grand-mère. En échange, soyez joueur en acceptant de temps à autre un petit tarot. De quoi renforcer les liens et espérer de meilleures étrennes. Quand on vous disait que le jeu est fédérateur…

LIENS
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