Samuel Degasne

Journaliste dépendant & théoriste musical.

Un samedi aux Eurocks : Alone in the Darc


Contrairement à sa sublime prestation à Bourges, l’exercice de Camille - white gospel & human beatbox à la sauce anglophone - a peiné à s’imposer. La faute au plein air qui, noyé dans le brouhaha, n’est pas parvenu à reproduire fidèlement au public les multiples chuintements et rythmiques corporelles utilisés. Malgré cela, la robe de la chanteuse offrant la vue de ses magnifiques fesses et l’improvisation en compagnie de Nosfell a su réanimer la ferveur. Tunng a révélé une électro pop efficace sans fioriture au son de cloches tintinnabulantes et d’un jeu électronique pour enfants. S’ils n’ont pas fait preuve d’originalité ou d’un palpable climat émotionnel, les très attendus Vampire Weekend, les Kitsuné Midnight Juggernauts, les deux chanteuses de Santagold ou encore le NME’s band The Wombats ont au moins su réaliser un set propre et efficace. Sharon Jones & The Dap Kings, sorte de mama black échappée de la Motown, a marqué les esprits d’un public pourtant à majorité rock. L’anti-Amy Winehouse est tombée à genoux et a fait entendre son coffre rugissant dans la pure tradition du style. Phoebe Killdeer & The Short Straws est toujours aussi magnétique sur scène et a offert une reprise de Ray Charles plutôt lancinante.

Cavalera Conspiracy fut finalement plus brouillon que les attentes l’espéraient, troquant l’aspect mélodique pour une lourde rythmique alors même que Sepultura avait su réhabiliter des influences tribales et brésiliennes. Malgré la fraîcheur du duo et une reprise de Gnarls Barkley, The DØ a étonnamment proposé un show uniforme et longiligne avec une voix de tête entêtante. Grinderman a délaissé les sphères dandy - pourtant intéressantes - de son chanteur Nick Cave pour perdurer dans le garage lourd. Pas encore totalement rodé ? Le maître de cérémonie lisait ses textes sur scène… Les molles instrumentations de N*E*R*D ont également surpris, malgré l’intelligence du projet et l’aura du producteur Pharell Williams. Sébastien Tellier fut davantage transparent que sexuellement transgressif. Ballons juvéniles et maquillage à la Björk, les CSS (Cansei de Ser Sexy) ont contre toute attente enfoncé le clou avec des versions énergiques beaucoup plus rock qu’électro à l’image de leur dernier album. Enfin, Fucked Up a distillé un punk primitif, dopé à la testostérone et appuyé par les interventions musclées (notamment contre Justice) de son chanteur, sorte de clone troublant de Zangief (Street Fighter).

> Sous Le Chapiteau, c’est le titubant Daniel Darc qui a allégrement remporté la mise. L’ange déchu et tatoué a multiplié les interventions gentillement cinglantes dans une tornade de larsens. Lorsque arrive l’hymne de Taxi Girl écrit « avec un type qui bosse pour Madonna », le chanteur justifie la reprise pour « payer son loyer » et demande cyniquement au public de taper dans ses mains « comme pour Indochine ». Bingo. Daniel se gausse dans un rictus hilare, malmène un spectateur ayant hurlé « rock’n’roooll ! » et se saisit de la grosse caisse pour l’envoyer sur son guitariste. Dépassant très largement le temps appartit, et ce malgré les gestes paniqués des roadies en coulisses, Daniel Darc s’est accroché au micro et reste seul en scène avec son missel, clôturant sur le « Redemption Song » de Bob Marley a capella. Plus tard, dans les coulisses, le chanteur est aperçu improvisant un bœuf à l’harmonica au stand Ricard. T’es rock, coco.


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