12 Août 2017
20 ans à se séparer, 7 à se retrouver... Avec à la clé : un guitariste remplacé, un 5e album studio et une tournée. Si sur eux tout a déjà été écrit, quoi de mieux qu'un covoiturage en tour bus, direction le festival Papillons de Nuit (Normandie), pour vérifier si le temps a eu raison des rockeurs brestois ?
C'est comment la vie en tour bus ? Calme. Incroyablement long, surtout. Tandis que les uns terminent leur nuit à l'étage couchette, les autres tentent un énième café dans le coin cuisine. « Attention, il y en a à qui il ne faut pas parler le matin... », prévient un technicien. Message reçu. Le regard vers l'extérieur, Éric (bassiste) briefe ses équipes au téléphone. Il a en effet conservé son travail à la mairie de Plougastel-Daoulas. Sitôt raccroché, il précise avoir même « co-organisé un festival en parallèle la semaine dernière » et mieux comprendre leur manager « pestant après le courrier qui s'accumule » lorsque la troupe est en tournée... Ce qui a changé en 20 ans ? « Le bus est devenu fumeur à 80% », lâche-t-il, hilare. Avant d'enchaîner : « On canalise différemment notre énergie, en apprenant à ne plus la gaspiller. Et puis, c'est surtout l'équipe technique qui fait l'ambiance. Là, on en est encore au stade des connaissances... » L'équipe se marre.
On prend alors le pouls auprès du manager, Julien, qui fulmine après sa connexion Internet... Ce come-back, alors ? « Nous n'avions rien à perdre, même si nous ne savions pas à quoi nous attendre. » Et personne pour ironiser sur le cachet ? « Avant de savoir ce que le groupe a touché, la question serait plutôt de connaître ce que nous avons dépensé... Tout vient de notre poche et ce n'est pas comme si nous avions un gros logo Universal sur le dernier album... » Car c'est effectivement Stan (chanteur) qui a notamment modifié la pochette, supervisé la production... « La seule chose qu'il n'a pas faite, c'est le pressage ! », ironise Julien, avant de préciser que les décisions étaient tout de même partagées.
D'autant qu'avant d'avoir été masterisées aux mythiques studios Abbey Road (Londres), les onze nouvelles chansons ont été créées à distance. Pour Emmanuel Baroux, le guitariste ayant rejoint Matmatah en 2015 avec l'inédit “Triceratops” présent sur le best-of du groupe, c'est « l'intérêt de la technologie ! Ne pas être dans la même pièce permet une radicalité que tu ne peux pas te permettre en groupe. Ça explique par exemple le kan ha diskan (ndla : chant et contre-chant breton) de Stan ou mon refrain plus électro sur le titre “Overcom”. »
Oui, mais n'est-ce pas retomber dans l'écueil du “rock celtique”, comme le sparadrap collé au capitaine Haddock ? « On ne l'a pas fait parce que c'est breton, mais parce que c'était bien », lâche Stan en descendant l'escalier. « On ne fait pas du rock celtique, mais du rock avec des influences. Nous ne sommes ni Stivell, ni Servat ou Ar Braz. » Quant à leur dimension populaire, le chanteur rappelle que « Cela n'indique en rien une facilité. Sinon, pourquoi les autres ne l'ont pas fait ? » L'argument est imparable.
Arrivée au festival. La troupe se dégourdit les jambes, assimile quelques sucres lents et expédie les balances pour « garder de l'énergie ». À chaque date, c'est la Madeleine de Proust. « On a l'impression de jouer les vieux briscards en connaissant toutes les zones industrielles », lâche Stan. « La routine arrive toujours. Il faut faire en sorte qu'elle arrive le plus tard possible... En cela, les festivals sont de bons retardateurs. » La tournée est d'ailleurs l'occasion de recroiser de vieilles connaissances : Mass Hysteria (avec qui ils avaient partagé leurs premiers festivals) ou encore Louise Attaque (« On fait pareil qu'eux, mais un an plus tard. Hé hé... »). Dans la foule qui attend, les visages ont aussi changé : les enfants ont remplacé les petits frères. « C'est incroyable : ils connaissent le premier et le dernier album », annonce Stan avant de s'élancer sur scène...
2h plus tard, épuisés, c'est le débrief en loge. Stan, avec un clin d'œil : « C'est agréable de perdre deux litres de flotte sur scène ! On évacue plein de choses... Il y a des réactions sur les nouveaux morceaux que nous n'avions pas connu jusque-là ! » De retour au tour bus, l'équipe philosophe : « On se connaît depuis longtemps. Notre avantage et notre défaut, ce sont nos réflexes ! » Et un futur concert à Matmata, le village troglodytique tunisien dont ils tirent leur nom (et lieu de tournage de Star Wars), ne serait-ce pas boucler la boucle ? « Le contexte est compliqué sur place... À moins, bien sûr, que la ville accepte enfin de rajouter un "h" à son nom », concluent-ils dans un éclat de rire, avant que le bus ne reparte vers l'Est. Demain, le groupe a rendez-vous à Toul...
Bonne route ! Promis, on laissera un commentaire positif sur le site de covoiturage.
Album Plates coutures (Autoproduit)
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